L’antibiothérapie, l’affaire de tous

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La montée de la résistance aux antimicrobiens est un enjeu de santé publique de plus en plus critique à l’échelle mondiale. Elle requiert la mobilisation de différents acteurs publics et privés du secteur de la santé. Parmi eux, des laboratoires pharmaceutiques comme Pfizer sont engagés depuis des années dans la lutte contre l’antibiorésistance et appellent à des changements nécessaires à différents niveaux.

L’antibiothérapie est l’affaire de tous ! C’est le postulat que la filiale française du laboratoire, présidée par Reda Guiha, souhaite faire imprégner au grand public. C’est aussi le titre d’un livre blanc que Pfizer a réalisé en partenariat avec l’Institut Pasteur, Biomérieux, BEAM Alliance et le Comité stratégique de filière. Ce livre blanc est le fruit du travail de réflexion entamé en 2024 à l’initiative du laboratoire, lors d’une conférence-débat, suivie d’un think tank éphémère sur les enjeux critiques de l’antibiorésistance et l’importance de l’innovation en antibiothérapie.

Ils ont réuni des experts issus de différents domaines pour échanger sur les défis actuels, et envisager des stratégies et solutions possibles. Cet éditorial aborde les sujets qui ont été mis en avant, de l’éducation et la sensibilisation à l’utilisation appropriée des antibiotiques, en passant par l’importance de politiques publiques coordonnées visant à soutenir la recherche et le développement de nouvelles thérapies.

Livre blanc : “L’antibiothérapie, l’affaire de tous”

L’antibiorésistance, un défi majeur de santé publique à relever ensemble

La résistance aux antibiotiques est aujourd’hui l’un des plus grands défis de santé publique à l’échelle mondiale. Selon les estimations, 1,3 million de personnes meurent chaque année des suites directes d’une infection résistante aux antibiotiques, et on compte 4,9 millions de décès supplémentaires indirects. En France, on dénombre 4 500 morts directes par an, et ce chiffre pourrait atteindre 238 000 d’ici 2050, si rien n’est fait.

Face à cette menace grandissante, il est urgent d’agir. Pourtant, le développement de nouveaux antibiotiques est extrêmement lent, et ne représente que 2,5% de la R&D pharmaceutique mondiale, contre 38% pour l’oncologie. Cette faible priorité accordée à la R&D en antibiothérapie s’explique notamment par la faible rentabilité des nouveaux antibiotiques, généralement utilisés sur de courtes périodes et souvent réservés à des traitements de dernier recours, dans le but de préserver leur efficacité. Cela entraîne des volumes de ventes faibles, tout particulièrement pour les indications de niche.

« Pour relever ce défi, une approche globale et coordonnée est nécessaire, combinant prévention, gestion responsable des antibiotiques, innovation et nouveaux modèles de financement, » déclare Reda Guiha, Président de Pfizer en France. « C’est un combat que nous devons mener ensemble ; professionnels de santé, décideurs politiques, industrie et citoyens. »

Sensibiliser pour prévenir la résistance aux antimicrobiens

Le premier enjeu est de sensibiliser l’ensemble de la société à l’importance cruciale de préserver l’efficacité des antibiotiques. Cela passe d’abord par des campagnes de communication grand public visant à promouvoir un usage plus responsable des antibiotiques et une utilisation réduite, notamment en incitant à la vaccination pour prévenir les infections bactériennes et virales.

Il faut également renforcer la formation continue des professionnels de santé – pharmaciens et médecins – sur les bonnes pratiques en matière de prescription et de contrôle des infections.

Sur le plan individuel, chacun a un rôle à jouer. Les patients doivent comprendre qu’ils ne doivent pas exiger systématiquement la prescription d’antibiotiques de leur médecin et accepter parfois des alternatives comme le repos ou les traitements symptomatiques. De leur côté, les professionnels de santé doivent systématiquement encourager l’utilisation de tests de diagnostic rapides avant toute prescription d’antibiotiques, afin de s’assurer de la nécessité du traitement.

Dans les établissements de santé, la mise en place de programmes de prévention et de contrôle des infections est essentielle, qu’il s’agisse du renforcement des mesures d’hygiène, de la formation du personnel soignant, ou encore d’une surveillance étroite de la consommation d’antibiotiques.

  • Enfin, Reda Guiha souligne la nécessité d’une meilleure coordination internationale, qui semble déterminante pour partager les bonnes pratiques et harmoniser les politiques de lutte contre l’antibiorésistance : « C’est un combat que nous devons mener ensemble, à l’échelle locale comme à l’échelle mondiale. »

Investir dans la recherche et le développement pour de nouvelles solutions

Le deuxième enjeu majeur est d’investir massivement dans la recherche et le développement de nouvelles solutions thérapeutiques, afin de garantir l’efficacité des traitements face à la menace grandissante de la résistance aux antimicrobiens.

Malgré l’urgence de la situation, le pipeline de R&D des antibiotiques reste insuffisant. Il est donc primordial de stimuler l’innovation dans ce domaine, en mobilisant davantage de financements publics et privés et en encourageant la mise en place de partenariats ambitieux, associant les acteurs de la recherche académique, de l’industrie pharmaceutique et des autorités de santé.

Au-delà des antibiotiques, il faut aussi soutenir le développement de nouvelles approches thérapeutiques, telles que les alternatives aux antibiotiques (phagothérapie, thérapies ciblées, etc.) ou les diagnostics rapides permettant une prescription plus ciblée. L’objectif est de diversifier notre arsenal thérapeutique pour mieux répondre à l’évolution constante des bactéries.

Enfin, il convient de valoriser les antibiotiques existants, en réévaluant régulièrement leur place dans l’arsenal thérapeutique face à l’émergence de nouvelles résistances. Cela permettra de s’assurer que nos traitements actuels restent efficaces le plus longtemps possible.

Repenser les modèles de financement pour une lutte durable

Le troisième enjeu d’importance est la mise en place de modèles de financement innovants et pérennes. Il faut notamment encourager la France et l’Union européenne à instaurer un modèle de financement cohérent, fondé sur la séparation entre le prix des antibiotiques et leur volume de vente. L’objectif est de décorréler la rémunération des laboratoires pharmaceutiques et la quantité d’antibiotiques vendus, afin d’encourager le développement de nouvelles molécules, tout en préservant leur bon usage.

Les experts s’accordent aussi sur la nécessaire revalorisation du prix des antibiotiques matures, afin de les maintenir sur le marché et d’intégrer dans l’évaluation de la Haute Autorité de Santé (HAS) la dimension de risque de santé publique à venir. En incluant cet aspect, l’évaluation ne se limiterait pas à l’efficacité clinique im­médiate, mais prendrait également en compte l’impact potentiel sur la santé publique à long terme.

De plus, faciliter l’inscription des antibiotiques sur la liste en sus [1] est une nécessité pour garantir un accès rapide et équitable à ces médicaments, quel que soit leur niveau d’évaluation, tout en favorisant l’innovation dans leur développement.

L’adaptation du conditionnement à la durée exacte des traitements prescrits est aussi une mesure à considérer, pour éviter le gaspillage et les pénuries, mais également pour prévenir l’antibiorésistance, car la réutilisation d’antibiotiques inutilisés, dans un cadre non supervisé par un médecin, est une pratique courante des usagers

Enfin, la création d’un comité d’infectiologie au niveau de l’Agence européenne des médicaments (EMA) et l’octroi d’un statut spécifique aux antibiotiques, semblable à celui des médicaments orphelins, seraient des leviers complémentaires.

  • Reda Guiha conclut par ces mots : « Seule une approche globale et coordonnée, associant prévention, innovation et nouveaux modèles de financement, permettra de relever avec succès le défi de l’antibiorésistance. C’est un combat de tous les instants, qui nécessite l’engagement de l’ensemble des acteurs de la société. »

Ensemble, mobilisons-nous pour préserver l’efficacité de nos anti-infectieux et protéger la santé de tous. C’est là l’enjeu d’une action collective d’ampleur, à la hauteur de l’urgence sanitaire que représente la résistance aux antimicrobiens.

Auteur

Reda Guiha

Président
Pfizer France